Quand Nietzsche pleurait...
25 sept., 2007
João Calangro

La bonté serait-elle la chose la plus troublante au monde? Cette question émane de José Saramago (Cadernos de Lanzarote), l’un des intellectuels les plus vénérés de la littérature portugaise récente. Communiste, matérialiste, athée, pessimiste, connu pour sa narration non conventionnelle, son œuvre s’est prêtée et se prête à une multitude d’analyses sans fin. Dans le texte exposé dans ce lien, Alípio Maia e Castro (A Família - Uma Perspectiva Cristã), auteur catholique portugais, expose sa thèse selon laquelle Saramago est avant tout un humaniste. Ainsi, en tissant son argumentation qui mène à la découverte d’une “bonté saramaguienne” et d’une recherche de “nature humaine” inscrite dans le discours de son compatriote, il ne fait rien de plus qu’exercer au maximum la caractéristique que le phénoménologiste Luc Ferry (Apprendre à vivre) considère comme indispensable pour comprendre le monde humain: la “pensée élargie”. Comme Ferry, phénoménologiste avoué athée mais non matérialiste, entretenant néanmoins un intense échange intellectuel avec son ami athée déclaré matérialiste mais humaniste, André Conte-Sponville (Petit Traité des grandes vertus), ce dialogue peut-être improbable entre les textes de Saramago et de Maia e Castro nous renvoie à la nouvelle éthique que Luc Ferry et les phénoménologistes humanistes estiment émerger du respect de la pluralité: une “philosophie (et éthique) de l’amour”. Ce dialogue entre antithèses, cette pluralité d’opposés coexistant dans une harmonie dont même Friedrich Nietzsche, l’auteur d’Ecce Homo, n’a pas rêvé avec ses coups de marteau, ne nous trouble-t-il pas véritablement?